jeudi 11 septembre 2008

Notre Chine d’ici et demain

Depuis des jours, il s’était dit qu’il écrirait quelque chose de joyeux, de gai. De cesser d’être bilieux même si la réalité est anxiogène. De trouver de belles, de bonnes choses à dire, d’obéir au philosophe Gramsci en cultivant l’optimisme de volonté et laisser au repos le pessimisme de la raison. Il avait vu la cérémonie d’ouverture des jeux olympiques, il en avait été ébloui et avait pris des résolutions solennelles : il faut être positif comme les chinois. L’histoire de ce peuple, lui aussi, ne fut pas de tout repos, loin de là. Mais les chinois démontrent un élan qui fait rêver. Ils partent vers le monde, non pour fuir leur pays, mais pour l’étendre, pour le mettre à la dimension qu’ils jugent être la sienne. Il ne pouvait bien sur comparer son pays à la Chine, où l’Etat est continu depuis des milliers d’années et où une ville pouvait avoir autant d’habitants que sa patrie. Mais, il cherchait, au milieu de la féérie raisonnée de la cérémonie d’ouverture, le ressort secret qui faisait qu’un peuple, une civilisation renaissent et proclament à la face du monde : j’existe et je suis présent, malgré mes problèmes, mes faiblesses, mes carences ; je reviens de loin et je sais où je vais. Lui également, il savait d’où il venait : d’un formidable coup de rein contre l’effacement donné un 8 mai 1945 et qui s’est poursuivi par l’obstination à tenir, à ne rien céder, à ne pas renoncer. Puis vint le temps où tout semblait encore possible. Ce sont ces temps de fraicheur, plein d’allant, qu’il cherchait en ces jours, gagné par l’euphorie provoquée en lui par la féérie chinoise. Mais comment trouver des indices chinois dans une Algérie sans dessein, où des fonctionnaires sans âme jouent à faire semblant de faire de la politique, où des hommes et des femmes, instruits, dans la force de l’âge, cherchent à imiter ceux qui ont été éjectés de l’école : partir, quitter les rivages de l’enfermement. Comment regarder droit devant quand tout semble figé et régressif ? Comment trouver de l’optimisme au milieu d’Algériens constamment au bord de la crise de nerfs… Comment rêver quand des zombies continuent à vouloir tout faire exploser, à commencer par leurs frères ? Comment être chinois dans une réalité fermée, dans un monde clos et borné ? Guicciardini, un autre philosophe italien, contemporain de Machiavel, écrivait qu’il n’est rien de plus triste de vivre sa vie au moment ou sa cité est en déclin. Il ne reste alors que de rêver de Chine en attendant qu’un jour peut-être le destin se décidera à changer sa course bégayante et que les rives de la fuite vers un ailleurs improbable se transforment en berges de l’espoir et de la joie de vivre. La Chine alors ne sera plus si lointaine.

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