05 octobre 2013
http://www.lequotidien-oran.com/?news=5188631&archive_date=2013-10-05
Octobre et le néant
Par K.Selim
Octobre 1988 a vingt-cinq ans. Dans six mois seulement
il y aura des élections présidentielles – selon le calendrier officiel – et
cela se discute, exclusivement, au sein du système. Même les animateurs
périphériques de la fiction politique ne sont pas consultés et sont livrés à
eux-mêmes. Cela se « concocte » loin des regards même si dans la
presse on donne des «infos » censées éclairer les enjeux, suggérer un
« conflit » et désigner des
protagonistes. En réalité, sans nier la réalité des « clans », c’est
une partie qui se joue chez les actionnaires principaux du régime. Et chez eux
seuls. Les Algériens, eux, ne sont pas concernés. Ce n’est pas leur choix, il
faut le préciser. Depuis octobre 1988, les Algériens cherchent le changement
mais ils n’arrivent pas à se doter des instruments pour le réaliser. Parfois,
le système parvient à créer l’illusion qu’il y a des enjeux et que le
« changement » est dans l’air. Mais le plus souvent, les Algériens
observent que tous les instruments du changement pacifiques sont neutralisés et
qu’on les invite à accepter des ersatz de vie politique. Chez les animateurs
agrées et… dans la presse. Un quart de siècle après octobre 1988, la société
algérienne a changé, le système est toujours là. Pratiquement intact avec ses
mêmes ressorts, ses gaspillages, ses corruptions et ses inefficacités
amplifiées. Bien entendu, les apparences du changement sont aussi là : des
partis, en surnombre, qu’on met parfois sur la scène publique comme un lâcher
de faisans, des journaux et même des télévisions ! De quoi les algériens
se plaindraient-ils ? Après tout, Octobre 1988 a cessé d’être un complot
depuis que la diplomatie algérienne le présente étant un « printemps
algérien » accompli bien avant la vague tunisienne. De quoi
« croire » le rapport de l’Onu sur le bonheur où l’Algérie n’est pas
mal lotie, ce qui est rare dans les classements internationaux. On a de
l’argent, le pouvoir veille et les algériens ne veulent pas d’une nouvelle
plongée dans les violences. Cela donne les ingrédients d’une stabilité illusoire. Les tenants du régime
trouveront une fois de plus, d’une manière ou d’une autre et sans se soucier du
niveau alarmant de ceux qui ne votent plus et ne regardent plus les JT, le
moyen de réduire le scrutin à un acte de confirmation. Exactement,
comme cela se passait dans une Algérie officiellement sous parti unique d’avant
octobre 1988. L’Algérie en tant que société a changé énormément en 25 ans. Elle
a perdu une bonne partie de l’encadrement formé durant le premier quart de
siècle de l’indépendance. Elle a connu une période d’affrontements et de
traumatismes qu’on a choisi d’occulter au lieu de traiter. Elle a surtout un
régime qui a tourné le dos jusqu’à l’idée d’une auto-réforme. On lui impose un
surplace politique pour contrer une réforme nécessaire pour être dans son temps
et changer un fonctionnement économique désastreux pour ne pas renoncer au
développement. La neutralisation des réformes a été très couteuse.
L’Algérie a perdu une population de cadres, la société est sans cap mêlant
renoncement, incivisme, bigoterie et cynisme. Il n’existe pas de vie politique
sérieuse et compétitive qui permet de cadrer les enjeux et de débattre des
options d’avenir. Tout se décide en vase clos au sein du régime. 25 ans après
octobre 1988, l’Algérie politique est figée… Dangereusement. Le pays qui
a des potentiels important est entravé et encerclé par un régime tendu
uniquement vers sa propre reconduction. Un régime où l’on ne voit aucun
personnage « éclairé » comprendre, avec effroi et un grand sentiment
d’urgence nationale, qu’il faut changer avant qu’il ne soit trop
tard !
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